Alors, le masculin générique est-il vraiment neutre ? J’ai lu en 2024 le livre « Le cerveau pense-t-il au masculin ? ». Il résume 40 ans de recherches qui confirment que le cerveau ne « pense » pas au masculin, surtout si l’on est une femme ou une personne non binaire.
Et pourtant, cette règle linguistique est encore soumise comme une norme « neutre », qui demeurerait sans incidence sur nos représentations. Mais ses effets néfastes sont bien réels, notamment sur nos choix professionnels et nos prises de décisions quotidiennes.
Les mots influencent notre perception du monde et des rôles de genre. De nombreuses études montrent que le masculin générique brouille nos représentations mentales.
Je te propose un petit jeu :
Qui imagines-tu quand tu entends Les chercheurs ont fait des avancées incroyables sur le traitement du cancer du pancréas ?
Et quand tu lis : les secrétaires de direction ont organisé un événement.
Si, dans le premier exemple, tu visualises plus d’hommes, et, dans le second, que des femmes, tu souffres de biais cognitif. Ne t’inquiète pas, ça se guérit quand on en prend conscience. C’est le cas de la majorité de la population en vérité. Et ce biais s’ancre très tôt : selon Ophélie Tremblay, professeuse à l’Université du Québec à Montréal, les enfants de trois à cinq ans associent déjà des mots comme piéton plutôt à des garçons. La neutralité du masculin ? Très relative…
Son impact est encore plus visible dans le monde du travail. Les offres d’emploi rédigées au masculin « pour ne pas alourdir le texte » entraînent un effet direct : les femmes postulent moins.
À l’inverse, comme je l’écrivais dans une précédente infolettre, l’usage des doublets augmente le nombre de candidatures féminines, quel que soit le domaine. Nommer les métiers au féminin ouvre des possibilités.
D’ailleurs, je te conseille le spectacle de Typhaine D. Contes à rebours. J’ai eu la chance de le voir à Nantes le 28 mars 2025. C’était fabuleux… ou fabuleuse, si j’écris dans la langue que l’autrice et actrice à inventer : la féminine universelle.
Elle adapte son spectacle pour les entreprises, universités, lycées, collèges et écoles. N’hésite pas à la contacter pour sensibiliser aux questions des égalités et des inégalités dans ton établissement.
Prenons l’exemple du métier d’infirmier. On parle souvent des infirmières, mais médecin et chirurgien restent majoritairement associés à des figures masculines. Ce biais renforce les stéréotypes : les femmes soignent, les hommes réparent. Pourtant, la réalité est plus nuancée.
Une étude de 2015, menée auprès de jeunes de 14 à 17 ans, a montré que la perception des métiers change lorsque l’on formule les intitulés de manière inclusive. Cela ouvre des perspectives et encourage les jeunes à envisager des carrières hors du formatage sociétal.
L’écriture inclusive est souvent critiquée, mais son impact est bien réel. Une expérience menée par Armand Chatard en 2005 en Suisse a révélé que, lorsque les métiers sont présentés en doublets (mathématicien, mathématicienne), les filles se sentent plus légitimes à envisager ces carrières.
L’écriture inclusive s’avère un levier pour élargir le champ des possibles dès le plus jeune âge.
Ah ! Le syndrome de l’impostrice ! J’ai l’impression que toutes les femmes l’ont ressenti à un moment ou à un autre. Parfois, il nous colle un peu trop à la peau.
D’ailleurs à ce sujet, on m’a transmis l’article de Juliette Raynaud la semaine passée, Posture ou imposture ? Elle parle plutôt de sentiment d’imposture. En effet, un syndrome sous-entend une maladie, alors qu’un sentiment, lui, peut être modifié par nous-mêmes.
Quel lien avec le masculin « générique » ? Quand on nous répète que « le masculin inclut tout le monde », mais qu’en réalité il ne représente que les hommes, comment se sentir légitime en tant que femme ?
Si la langue occulte une partie de la population, difficile de ne pas intérioriser l’idée qu’on n’a pas vraiment sa place dans la société.
Bien sûr, ce n’est pas le seul facteur du syndrome ou sentiment de l’impostrice, mais le langage joue un rôle clé dans la construction de notre confiance en nous.
J’ai appris quelque chose de fascinant lors d’un séminaire d’Isabelle Meurville : 40 % de notre journée est faite d’habitudes. Créer une habitude requiert beaucoup d’énergie.
Et ça m’a rappelé une anecdote. J’ai étudié Le Malade imaginaire de Molière au collège. À la maison, mes parents possèdent une très belle collection de ses œuvres… en ancien français.
J’ai donc lu une version où « je pensais » s’écrivait « je penƒois », et où la lettre « s » était remplacée par un « ƒ » (« ƒilence » au lieu de « silence » — au début, je lisais mentalement le son [f] comme vous venez surement de le faire).
J’ai beaucoup rigolé et fait de la gymnastique mentale. Puis, avec le temps, sans m’en rendre compte, je n’y prêtais plus attention. Le plus dur quand même fut de lire à voix haute devant toute la claƒƒe.
Apprendre à parler et à écrire de manière inclusive, c’est la même chose : au départ, ça demande un effort. Mais avec l’entraînement, cela devient naturel.
Et en prime, ça stimule notre cerveau, comme l’apprentissage d’une nouvelle langue. Alors, créons des habitudes inclusives en parlant et en écrivant !
Plusieurs études scientifiques l’ont démontré : la matière grise (partie du cerveau composée de neurones et de cellules) et la matière blanche (ensemble de fibres « connecteur » des différentes zones cérébrales) augmentent chez ceux qui étudient assidûment une nouvelle langue.
Apprendre une langue à l’âge adulte : bon pour le cerveau ! — Caisse d’allocations familiales
Je vous conseille la lecture de l’article de Diane Moinet Parle-t-on encore aujourd'hui la langue de Molière ?
Bonne nouvelle : des solutions existent depuis longtemps ! Bien avant que l’Académie française ne s’en mêle, la langue était déjà plus flexible. Même Molière rédigeait en doublets : « Venez, bergers, Venez, bergère ».
Si le sujet t’intéresse, je te recommande le site et le tract des linguistes atterréEs, qui montrent que la langue française ne ressemble plus du tout à celle de Molière. Contrairement à ce que pensent certaines et certains ! C’était écrit la plupart du temps, en plus, en phonétique.
Quelques pistes simples à adopter :
les mots épicènes (spécialiste, artiste, collègue, élève… facile !) ;
les doublets (les enseignants et enseignantes) ;
les pronoms neutres comme on ou iel (voir ici) ;
la structure grammaticale ;
les fonctions ;
les anglicismes.
Pas besoin de tout utiliser d’un coup. Chacun et chacune avancent à son rythme. Et si tu trouves cela complexe, sache qu’il existe des personnes pour t’accompagner…
Tu en connais au moins une : c’est mon métier. Besoin d’aide ? Découvre mes services sur mon site.
À bientôt,
Je traduis ton expertise métier en un langage clair et inclusif, pour une communication qui parle à toutes et tous. Développe ta marque employeuse inclusive !